L'homme en couleur
CD LFB 2001
textes et musiques BH sauf
indications
- L'homme en couleur
- Les effarés poème d'Arthur Rimbaud, musique BH
- La rumeur
- Un monsieur comme il faut
- Fleury Mérogis
- P'tit' femm' tout' frêle
- Béton armé Henri
Gougaud / José Cana, Max Rongier
- Au royaume de mon enfance Jacques Serizier
- Annonce
aérop'orlyenne
- Saga de l'avion
- Une longue nuit d'été
- Sur la place Jacques Brel
- Tjibaou
Yéweiné Yéweiné
1. L'homme en couleur 
Paroles et
musique
Bernard Haillant
1989 - 2000
PRÉAMBULE
À l’occasion
de la Grande Foire
du IIIème millénaire
des soldes
exceptionnels vous seront proposés
tout au long
de cet enregistrement.
Sept rayons
sont particulièrement bien achalandés.
TOUT DOIT
DISPARAÎTRE.
MAIS NE VOUS
BATTEZ PAS :
IL Y EN AURA
POUR TOUT LE MONDE !
au
rez-de-chaussée, 1er
rayon : « émotions »
Il est blanc
de colère
ou rosit de
plaisir
il est rouge
de honte
et devient
vert de peur
il vous fait
grise mine
se met à rire
jaune
avec ses
bleus à l’âme
il verrait
tout en noir…
Ah !
viendrez-vous
le voir ?
L’homme en
couleur
arrive
tout à l’heure !
au niveau
-1 vous attend le double
rayon
« minéraux »
Ah ! ce
type est en or
il est
couvert d’argent
il a un’ santé
d’ fer
un peu
d’soleil, y bronze !
Il est
toujours nickel
il a des bras
d’airain
avec des
nerfs d’acier
s’ la
joue heavy-metal ;
y sait s’
tenir au zinc
et souvent de
bon grès
mais sait
rester de marbre
avec son cœur
de pierre…
Plus régul
que le quartz
c’est la
perle des perles :
y paie rubis
sur l’ongle !
Ah !
viendrez-vous
le voir ?
L’homme en
couleur
arrive
tout à l’heure !
1er
étage, abondance au
triple rayon
« lieux
communs »
Il a le
profil grec
il est fort
comme un Turc
frais comme
un Esquimau
l’a des
querell’s d’All’mand
des pâtes
italiennes
un oncle en
Amérique
une auberge
espagnole
quelques
capot’s anglaises ;
chineur comme
un Chinois
nippé comme
un Nippon
plus rusé
qu’un Sioux
avar’ qu’un
Écossais
soûl comme un
Polonais
craquant
comme un p’tit Beur
plus écorché
qu’un Corse
et têtu qu’un
Breton ;
chauvin ?
un vrai Français !
il fait ses
coups en Suisse
il écrit
comme un Nègre
travaill’
comme un Arabe
se nettoie
comme un Slave
joue à la
roulette russe
et ne fum’
que du belge
Ah !
viendrez-vous
le voir ?
L’homme en
couleur
arrive
tout à l’heure !
à
l’entresol, sous la verrière,
quadruple
rayon
« jardinage »
Pendant qu’il
fait l’ poireau
alors qu’il
prend racine
admirez son thym d’ pêche
et ses yeux
en amande
sa bell’ têt’
de laitue
avec des feuill’s
de chou
ce beau nase
en patate
sous son
front d’avocat.
Ah ! le
chapeau melon !
Ah ! la
cravate à pois !
Y s’ prend
pour un’ légume
ce p’tit cœur
d’artichaut
ce bon gros
cornichon
cette espèc’
de grand’ courge
c’t élégant
salsifis
qui n’a qu’
du sang d’ navet ;
Ah,
vrai ! la mauvaise herbe
a s’ fait
brouter l’ persil
éplucher
l’abricot
ébouillanter
l’asperge
dégorger le
concombre
et reluir’ la
tomate
comme une
vieille échalote.
Ouille !
y ramèn’ sa fraise
j' te balance
des châtaignes
c’est lui qui
s’ prend les prunes
Aïe !
paf ! dans la pastèque !
Pif ! le
nez en groseille !
Et, fin des
haricots
v'là qu’y
tomb’ dans les pommes,
pourtant
c’est un’ bonn’ poire
Ah !
viendrez-vous
le voir ?
L’homme en
couleur
arrive
tout à l’heure !
quadruple
rayon également,
au niveau
-2, « bazar »
boîte à outils
papoum
papoum pap’
C’est une
armoire à glace
avec rien
dans l’ buffet
percé comme
un’ passoire
pas bien dans
son assiette
vraiment, il
nous bassine
il en fait
tout un plat
les châss’s
comm’ des soucoupes
y dit qu’il a
pas d’ bol
qu’y f’rait
mieux d’ boir’ la tasse
qu’il a pris
d’ la bouteille
qu’il a un
verr’ dans l’ nez
et qu’ ça lui
donn’ l’air louche
qu’il siffl’
comme un’ cocotte
qui
s’oublierait su’ l’ gaz
qu’ ça r’mue
dans sa caf’tière
mais qu’ c’est
pas près d’ passer
Puis le
r’mords le tenaille
y croit qu’y
d’vient marteau
y s’ fout l’
compas dans l’œil
le crân’ dans
un étau
des valis’s
sous les yeux
le moral en
dents d’ scie
y s’est mis à
la colle
c’est un fait
établi ;
y s’ plaint,
un’ vraie chignole
l’ arrêt’ pas
d’ raboter :
dit /
r’dit : j’ai tous les vices
rajout’ j’
vaux pas un clou
j’ peux pas
m’ voir en peinture
et j’
m’emmêl’ les pinceaux
j’ me
débrouill’ comme un manche
on f’rait
mieux d’ me cognée
L’homme en
couleur
arrive
tout à l’heure !
cour
intérieure, accès par la porte B,
rayon
« zoopsie »
Ah ! mon
dieu qu’il est chouette
caractère de
cochon
quelquefois
un peu ours
quoiqu’il
arbor’ l’air vache
c’ n’est pas
un mauvais ch’val
mais, têtu
comme un’ mule
y faut qu’il
prenn’ la mouche
et hurle avec
les loups.
Ah !
oui, un drôl’ de zèbre
un curieux
asticot
quand il n’y
a pas un chat
avec des
rus’s de r’nard
il attire les
pigeons
pour en faire
des dindons
et, voleur
pis qu’un’ pie
y paie en
monnaie d’ singe !
Il nous f’ra
dev’nir chèvre !
Non ! c’
n’est pas une oie blanche
c'est même un
chaud lapin
bien qu’il
peign’ la girafe
y va avec les
poules
il les saut’
comme un’ puce
et s’ prend
un pied de grue
ce satané
merlan !
un’ mémoire
d’éléphant
des larm’s de
crocodile
y pouss’ des
cris d’orfraie
y pue comme
un putois
et bav’ comme
un’ limace ;
roupille
autant qu’un loir
et s’ marr’
comme un’ baleine !
Ah !
viendrez-vous
le voir ?
L’homme en
couleur
arrive
tout à l’heure !
rayon
« beaux-arts –
Genèse »
(ascenseur
direct 7ème
ciel !)
Allez ! Prenez
vos craies
vos crayons,
vos pinceaux
vos fusains,
vos pastels
gouaches et
aquarelles
vos feutres,
vos stylos
vos doigts
tout à la fois
faites-moi
des portraits
ah,
faites-m’en des beaux !
Faites des
Picasso
des Renoir,
des Greco
à grands
coups d’ rouge à lèvres
et de vernis
à ongles
et de fards à
paupières
de rimmels et
de khôls
et de tart’s
à la crème
oui, des
Douanier Rousseau !
Torchez-moi
des visages
de divas et
de clowns
de stars, de
midinettes
liftez-moi
tout c’ qui passe
les prolos,
les banquiers
sus à vos
encriers
à vos bomb’s
à peinture
jetez-m’en
sur les murs !
Des p’tits,
des grands bonshommes
des couillus,
des Hénaurmes
des femm’s
nues, des girondes
des maigres
et des blondes
dans
l’albâtre ou le plâtre
à grands
coups de ciseaux
de marteaux,
de burins !
Faites-nous
des Rodin
des Claudel,
des Maillol
taillez-en
des guignols
allez-y dans
la glaise
pétrissez à
votre aise
des seins
durs, des seins mous
des bajoues,
des orteils
des, même à
vous, pareils
des mieux, si
c’est possible !
Allons, dépêchez-vous
il vous reste
un quart d’heure
non, plus que
cinq minutes
mais,
allez-y, bon dieu !
Et
soufflez-leur dessus…
Oh ! Vous
avez r’fait l’monde !
Et l’homme en
couleur…
Guitares :
Mathias Castagné
Percus,
cloches, sonnailles : Robert
Suhas
« zoopsie » :
vision hallucinante d’animaux, caractéristique de certaines
intoxications
2. Les effarés 
Poème
d’Arthur
Rimbaud
mis en
mélodie par
Bernard Haillant 1995
Noirs dans la
neige et dans la brume,
Au grand
soupirail qui s’allume,
Leurs
culs en rond,
À genoux,
cinq petits, – misère ! –
Regardent le
Boulanger faire
Le
lourd pain blond.
Ils voient le
fort bras blanc qui tourne
La pâte grise
et qui l’enfourne
Dans
un trou clair.
Ils écoutent
le bon pain cuire.
Le Boulanger
au gras sourire
Grogne
un vieil air.
Ils sont
blottis, pas un ne bouge
Au souffle du
soupirail rouge,
Chaud
comme un sein.
Quand pour
quelque médianoche,
Façonné comme
une brioche,
On
sort le pain,
Quand, sous
les poutres enfumées,
Chantent les
croûtes parfumées
Et
les grillons,
Que ce trou
chaud souffle la vie,
Ils ont leur
âme si ravie
Sous
leurs haillons,
Ils se
ressentent si bien vivre,
Les pauvres
Jésus pleins de givre,
Qu’ils
sont là, tous,
Collant leurs
petits museaux roses
Au treillage,
grognant des choses
Entre
les trous,
Tout bêtes,
faisant leurs prières
Et repliés
vers ces lumières
Du
ciel rouvert,
Si fort,
qu’ils crèvent leur culotte
Et que leur
chemise tremblote
Au
vent d’hiver.
Source :
collection
« GRANDS ÉCRIVAINS choisis par L’ACADÉMIE GONCOURT »
IBSN
2 – 85018 – 590 – 6
Arrangement :
Bernard Haillant
Chœur
du groupe « CATIMINI » :
Cokie
Demaïa,
Stéphanie Liesenfeld,
Isabelle
Morelli,
Janneke Muller
3. La rumeur 
Sketch de
Bernard
Haillant
1986 - 1987
Méfiez-vous
Prenez garde
Oh, faites
attention !
Ça circule,
c’est partout
Que j’ te
vas, que j’ te viens
Librement…
Soyez pas
fanfaron
Jouez pas les
malins :
C’est qu’
tout l’ monde ici même y peut en être atteint !
On est si peu
de choses
La vie n’est
pas si rose…
Quand la,
quand la…
Quand la
ru-rumeur vous prend, pardon, excusez-moi
Dieux, que
m’arrive-t-il ? Ciel, c’en est fait de moi,
Quand la
rumeur vous prend il n’est guère de salut
Vous n’êtes
qu’un rat mort qui erre dans la rue…
Déjà le mal
m’atteint et nous sommes le soir
Peut-être
qu’il vous gagne, il se répand si vite
La gangrène
est subite à celui qu’elle habite !
C’est ce
qu’on dit, du moins…
Alors,
pourquoi le taire
N’en faisons
plus mystère :
Y a pas d’
fumée sans feu
Et la faim
fait toujours sortir le loup du… bois
À trop parler
de lui on en verrait la queue…
Alors,
faisons silence
Celle du chat
balance !
Ou,
mieux : parlons, parlons
Parlons pour
ne rien dire
N’ayons pas
peur des mots et répandons le mal
Et ça,
faisons-le bien :
- Les agneaux
se conduisent… comme des moutons !
- Ce sont
toujours les premiers qui s’en vont les meilleurs…
- Les
grand-mères ont les os terriblement fragiles !
- Les poules
Sur leurs
murs (qui ont des oreilles)
Voient bien
qu’on mange leurs oeufs cuits durs :
Elles s’en
moquent à la coque !
-Alea jacta
est pendu au plafond
Et le petit
chaperouge est rond…
Et ron et ron
À p’tits pas
les bruits vont
Et patati
Et patatarte
à la crème !
Mais il en
restera bien un p’tit quelque chose…
… Alors, la
chevillett’ cherra
Et nos’
trombinett’s cherront !
Bouche à
oreille à bouche à oreille à
L’en restera
toujours quelque chose
Et la
trombinett’ cherra !

4. Un monsieur comme il faut 
Paroles et
musique de
Bernard Haillant
1986 - 1987
C’était un
très très grand poète
Les mots lui
poussaient sur la tête
Y avait pas
un journo
Qu’avait pas
sa photo !
Bien que sa
pensée fût concise
Et qu’il ne
dît point de sottises
Il était
rigolo
Avec ses
trémol O sole mio
paparazzi
– paparazzia – papagaïe –
aïe aïe aïe :
la
trombinett’ cherra
Son look
avait un goût sauvage
Ça mettait du
sel au message
Des frissons
dans le dos
Tel l’acier
d’un couteau
C’est vrai sa
bouche était exquise
Rougeoyante
et douce cerise
Les femm’s
l’aimaient beaucoup
Nous on était
jaloux ououououououh
Oh sont
fâchés fâchés fâchés sont
Les jolis
garous jaloux jolis… allons,
la trombinett’ cherra !
Ses drôl’s de
mains baguées et fines
Nous découpaient
l’air en tartines
Nous
bénissant cent fois :
Divin
Karatéka…
Puis il
lévitait en cadence
Etranges
danses, étranges transes
S’il
redoublait d’effort
Nous, on
criait : « Encore ! »
Ramassis
d’inassouvis assassins,
rasseyez-vous
Rassurez-vous,
la trombinett’
cherra !
Tour à tour
mystique ou obscène
Il nous
décrassait les antennes
On en restait
baba,
Pantois, coi
et sans voix…
Son nœud
tournoyait comme un phare
Ça foutait l’
feu dans nos cigares
Embrasait les
jupons
Tout du sol
au plafond
Lâchez le
cucurbitacé, c’est assez,
lâchez-le
HLM,
Hachélaime comme chair à pâté et
la
trompin’…
de ch’val ?
Pourtant il était
convenable
Pognon sur
rue, mains sur la table
Et s’il
faisait le beau
C’était pour
son boulot…
Maître de lui
des bons usages
Lui,
froid ? Jamais, c’était un sage
Un Monsieur
comme il faut
Qui fait dans
l’caniveau Oh oh oh
Sali aux
lazzis, les sott’s sall’s s’y
fient
Ce gâchis,
ça suffit, la trombin’ a
tchiu
Cett’ chanson
n’est pas très honnête
Elle a
quelque chose qui m’inquiète
La poésie c’est
beau
Mais quand
c’est trop, c’est trop !
Alors oubliez
cette fable
Sans queue ni
tête, elle est minable
Je lui mets
un zéro
Mais cessez
vos « BRAVOOOOOOOOOS » !
« Bravo
pour le
clown » : citation musicale !
Arrangement :
Bernard Haillant (guitare) avec le
concours de
Claude
Georgel
(saxophone alto)
Contrebasse
et
écriture sax baryton (joué par Claude) :
Patrice
Caratini

5. Fleury-Mérogis

Texte et
musique de
Bernard Haillant
texte vers
1986 et
harmonisation 3 voix 1988
Fleury-Mérogis
petite cité
de la banlieue sud de Paris ;
Fleury-Mérogis
ce n’est plus
tout à fait la campagne
mais ce
n’sera probablement jamais vraiment la ville ;
Fleury-Mérogis
ses immeubles
un peu tristes
ses villas
banales
ses gens
ordinaires ;
Fleury-Mérogis
sa spécialité
locale :
ses prisons
modernes,
une pour les
hommes,
une pour les
femmes,
une pour les
jeunes…
Arrangement
et
chœur : Bernard Haillant

6. P'tit' femm' tout' frêle 
Paroles et musique de Bernard Haillant
hiver 1984 - 1985
P’tit’ femm’
tout’ frêle
En l’ombre
d’elle
Est endormie
Mais les œufs
chauds
De ses yeux
clos
Ont tant de
vie…
Y passent des
images claires
Des baisers
doux, des bras de mère
Des réveils
ourlés de lumière ;
Soleils
sucrés et confitures
Dans un ciel
de lait lisse et pur
Et ces
oiseaux de pain doré
S’éclaboussant
de café frais ;
Bruits
familiers, chuchotements
Senteurs de
jardin sous le vent
Et premier
vêtement qui glisse
Cette main
posée sur ton dos
Et puis comme
un lointain sanglot
Et les
couleurs s’évanouissent…
P’tit’ femm’
tout’ raide
En l’ombre
d’elle
S’est
réveillée
Et les œufs
ronds
De ses yeux
sont
Désenchantés !
Y mordent des
images dures
Des angles
morts, des cours obscures
Couloirs gris
et cris de serrures ;
Cellule nue,
morne fenêtre
Où l’amour
jamais ne pénètre
Ni l’odeur
d’un chocolat chaud
Ni la lame
d’un soleil haut ;
P’tit’ femm’
blessée garde fermés
Tes yeux,
fais comm’ si le bon dieu
N’avait pas
autant de malice…
Un jour, tu
n’auras plus si mal
Finira
l’hiver carcéral
Et refleurira
Mérogis…
Mérogis…
Mérogis… Mérogis…
P’tit’ femm’
tout’ frêle
En l’ombre
d’elle…
Arrangement,
guitare,
chœurs : Bernard Haillant

7. Béton armé 
Paroles : Henri Gougaud - Musique : Max Rongier et José Cana
Éditions Warner Chapell
Music France
Béton
armé, soleil en berne
Hommes de
nouvelles cavernes
Voilà
ce que nous devenons
Et pardonnez-moi si j’en tremble
J’avais rêvé de grands ensembles
« Ensemble » est un si joli nom
Du
ciment à l’horizontale
Du
ciment à la verticale
Et
puis le vacarme têtu
Ces
grands ensembles sont si rudes
Que
je rêve de solitude
Comme
d’un paradis perdu
Dieu, qui
voulez la vie si belle
Allez un
peu voir à Sarcelles
Sarcelles
était un nom d’oiseau…
Aujourd’hui,
l’oiseau est en cage
Et
moi je trouve ça dommage
Si
vous, vous le voyez de haut
Béton
armé, soleil en berne
Hommes
de nouvelles cavernes
Voilà ce
que nous devenons
Si
vous n’y mettez pas bon ordre
Bientôt
la vie si bonne à mordre
Ne
méritera plus son nom
Ah,
faites-moi changer d’adresse
Et faites
que le vent caresse
Encore une
fois mes mains nues
Le
vent, le vrai, pas cette crasse
Qui
nous fait le cœur dégueulasse
En
ramonant nos avenues
J’ai
besoin d’air, Dieu me pardonne,
De
celui que le ciel nous donne
En
passant par l’odeur des prés
Et si
un jour la mort m’empoigne
Que
ce soit en rase campagne
Avec de
l’air, Bon Dieu, du vrai
Avant
de payer l’échéance
Je
voudrais qu’on donne une chance
À mes
chansons sans hystérie
Et s’il
n’y a plus rien à faire
Mettez-moi
sous un peu de terre
Si vous en
trouvez à Paris
Orchestration :
Patrice Caratini pour le quatuor de
saxophones
SAX 4 (soprano : Claude Georgel ,
alto : Dominique Tassot,
ténor :
Éric Fiegel, baryton : Jean Kiffer)
8. Au royaume de
mon enfance 
Paroles et
musique de
Jacques Serizier
Arrangement
et
1ère guitare : Bernard
Haillant
2ème
guitare : Mathias Castagné

9. Annonce
aérop'orlyenne 
Sketch
introductif de
Bernard Haillant
Les passagers
du vol UTA 666
Passengers
flight UTA 666
à destination
de
Los Angeles
Faaa
Nandy
La Tontouta
Port Vila
Espiritu
Santo,
terminus !
Ladies
and gentlemen
to L.A.,
Tahiti
Fidji
New
Caledonia
New
Hebrides [Vanuatu]
Espiritu
Santo,
stop!
please go
quickly gate 54 (fifty four)
with
billet, passport, hand-bag
to an
imminent departure.
Nos
aimables passagers
sont priés de
se présenter porte 54 (Meurthe-et-Moselle)
munis de leur
billet, leur passeport, leurs bagages à main
dans l’espoir
d’un départ quasi immédiat ;
EN
VOITURE S’IL VOUS PLAÎT…
FERMEZ
LES
PORTIÈRES,
ATTENTION
AU
DÉPART !
Le commandant
de bord et son équipage
sont heureux
de vous accueillir à bord de cet appareil.
Ils vous
souhaitent un excellent voyage
et vous
prient de bien vouloir
éteindre vos
ceintures, attacher vos cigarettes
et rester
assis pendant toute la phase de décollage
ceci jusqu’à
l’extinction des voyants lumineux situés
de part et
d’autre, à gauche, à droite, au centre,
au-dessus, en
dessous, à l’avant et à l’arrière de l’habitacle.
Mais je me
tais, car il me semble que notre
programme
musical vient de commencer…
Nos
hôtesses, par ordre d’entrée en hall d’aéroport : Janneke
Muller et
Stéphanie
Liesenfeld
Notre
chef de gare : Jean-François
Maenner
Notre
commandant de bord : Laurent Malot
Au
sifflet cheminot : Bernard Haillant
« Faaa » :
aéroport de Tahiti
« Nandy » :
aéroport des îles Fidji
« La Tontouta » :
aéroport de Nouvelle-Calédonie
« Port Vila » :
capitale de Éfaté,
VANUATU (ex
Nouvelles-Hébrides)
« Espiritu
Santo » : l’une des très nombreuses îles de Vanuatu

10. Saga de l'avion 
Paroles et musique de Bernard Haillant
mars 1990, 1ersemestre 1993
Il a décollé
l’avion, l’avion il a décollé
D’aérop’ Orly
l’avion, l’avion il a décollé
Il a bien
volé l’avion, l’avion il a bien volé
Douze heures
sans poser l’avion, l’avion il a bien volé.
Big
escale y fit l’avion, l’avion big escale y fit
À Los Angeles
l’avion, l’avion big escale y fit
Avant
reparti’ l’avion, l’avion avant reparti’
À Tahiti
atterri’, l’avion avant reparti’.
« Ia
orana »
sous la pluie, sous la
pluie « Ia orana »
Ça sent si
bon j’en pleurai, sous la pluie « Ia orana »
M’a dit
rembarquer l’avion, l’avion m’a dit rembarquer
Pour La Tontouta
gagner, l’avion
m’a dit rembarquer !
J’ai dit le
Caillou
bonjour, bonjour j’ai dit le Caillou
Que
singulière est ta terre, bonjour j’ai dit le Caillou
Nous quitter
« tata »
déjà, déjà
« tata » nous quitter
Pas
impatienter l’avion, déjà « tata » nous quitter…
Pour fin m’a
mené l’avion, l’avion m’a mené pour fin
À Santo
d’Espiritu, l’avion m’a mené pour fin
J’y ai vu des
noirs tout blond, tout blond j’y ai vu des noirs
Là c’est bout
du monde j’ai dit, tout blond j’y ai vu des noirs !
Dit, l’ est
temps rentrer l’avion, l’avion dit : l’ est temps rentrer
Via Colombo,
Karachi, l’avion dit : l’ est temps rentrer
M’a rapatrié
l’avion, l’avion m’a rapatrié
Tit matin
« Froid-gris-en-France », l’avion m’a rapatrié.
J’ai dit au
revoir l’avion, l’avion j’ai dit au revoir
Salut z’amis,
la famille, l’avion j’ai dit au revoir
L’homme qui
revient n’a plus, n’a plus l’homme qui revient
Tout à fait
même refrain, n’a plus l’homme qui revient !
Au ventre a
mûri la femme, la femme au ventre a mûri
Devenu rond
comme Airbus, la femme au ventre a mûri
Dans trois
tout tits mois l’enfant, l’enfant dans trois tout tits mois
Va montrer l’
bout d’ son cockpit, l’enfant dans trois tout tits mois.
De des
propres ailes il va, il va de ses propres ailes
Sous notre
nez s’envoler, il va de ses propres ailes
Sitôt décollé
l’aîné, l’aîné sitôt décollé
Avion cadet
prend la piste, l’aîné sitôt décollé
Au revoir si
chers avions, avions si chers au revoir
Temps-autre
v’nez fair’ tit’ escale, avions si chers au revoir
Volez grand,
volez longtemps, longtemps volez grand volez
Bon cap et
bonne espérance, longtemps volez grand volez
Bon cap et
bonne espérance et
Bienvenue…
Bienvenue… Bienvenue…
Aux petits
enfants !
1ère
guitare et percu-tuyau-plastique : Bernard
Haillant
2ème
guitare : Hervé Delaiti
Écriture
des
chœurs et charengo : Isabelle
Morelli
Basse
vocale : Jean-François Maenner
Chœur :
« CATIMINI » (Cockie Demaïa,
Stéphanie Liesenfeld,
Jean-François Maenner, Isabelle Morelli et Janneke Muller)
ainsi
que Hervé Delaiti, Véronique Gain et Laurent Malot
Salutation
tahitienne : bienvenue, bonjour joyeux !
Le « Caillou »,
c’est ainsi que l’on nomme la Grande Terre
de Nouvelle-Calédonie.
« tata » :
au revoir, voire bonjour… salut, quoi ! (Nelle-Calédonie)

11. Une longue nuit d'été 
Paroles et musique de Bernard Haillant
de 1985 à janvier 2000…
ANTIENNE
Une longue
nuit d’été
En sa rondeur
d’étang
Aux rives
incertaines
Aux fougères
froissées
Aux paupières
humides
Aux étoiles
brisées
Aux écorces
amères
Une longue
nuit d’été
PSAUME
M’est arrivé
comme un certain bonheur
mais le
bonheur est un’ drôl’ de blessure
dont la plaie
se referme si mal
c’est qu’ell’
se trouv’ à la jointure
au creux
secret de la pliure
à la
vulnérable limite
entre l’âme
et le corps
là où le
désir dort…
… et où les
sexes boivent
nonchalants
en laissant
leurs empreintes dans la terre molle
alors que les
chasseurs se trouvent à deux pas
et que leurs
chiens aboient ! aboient !
aboient !
aboient ! aboient ! aboient !
Oh… la drôl’
de blessure
que cell’ qui
se rouvre sans cesse
aux mille
peines quotidiennes
à la moindre
petite ivresse
aux
va-et-vient de la vie même
aux marées –
mères qui égrènent
les enfants
dans leur tablier
et saignent
saignent
comme sable
au sablier
Oh pourquoi
le bonheur
fait-il
toujours si peur ?
Comme ell’
démange cette blessure
- plus bouger
-
éviter que
cela ne suppure
- plus bouger
-
attendre que
cela cicatrise
- plus bouger
-
que la
question se précise
être sûr
qu’il n’y ait
pas
anguille sous
roche
et pas
d’enfant mort-né
aux ourlets de la guérison
et pas
de
cri-muet
Qu’on me
laisse ! qu’on me laisse !
surtout
n’approchez pas
le bonheur
pourrait prendre peur
et fuir
dans les
herbes hautes…
… petit
animal craintif
qui
s’effarouche pour un rien
un
« peut-être »
un « qui
sait ? »
Oh pourquoi
le bonheur
a-t-il
toujours si peur ?
Aborder au
désert
s'y noyer
d’heure en heure
en toucher
les confins
s’y engloutir
pour enfin
déboucher sur
la mer
y débusquer
le bord
la rive
la fêlure
la faille
surprendre la
brisure
et naître
naître
être à naître
et voilà que
j’ai peur…
ANTIENNE
Une longue
nuit d’été
En sa rondeur
d’étang
Aux
rives incertaines
Aux fougères
froissées
Aux paupières
humides
Aux étoiles
brisées
Aux écorces
amères
Une longue
nuit d’été...
pré-créé
au
cours de l’atelier « LA
PLUME
DE L’OISEAU »
au « LOUP
DU
FAUBOURG »
le
samedi 26 septembre 1998 dans
l’après-midi
Arrangement :
Patrice Caratini
Contrebasse,
saxophone :
Claude
Georgel
Sur
un canevas de Bernard Haillant

12. Sur la place 
Paroles et musique de Jacques Brel
Éditions Universal /MCA Music France
Sur
la place chauffée au soleil
Une
fille s'est mise à danser
Elle
tourne toujours pareille
Aux
danseuses d'antiquités
Sur la
ville il fait trop chaud
Hommes
et femmes sont assoupis
Et
regardent par le carreau
Cette
fille qui danse à midi
Ainsi
certains jours paraît
Une
flamme à nos yeux
À
l'église où j'allais
On
l'appelait le Bon Dieu
L'amoureux
l'appelle l'amour
Le
mendiant la charité
Le
soleil l'appelle le jour
Et le
brave homme la bonté
Sur
la place vibrante d'air chaud
Où pas
même ne paraît un chien
Ondulante
comme un roseau
La
fille bondit s'en va s'en vient
Ni
guitare ni tambourin
Pour
accompagner sa danse
Elle
frappe dans ses mains
Pour
se donner la cadence
Ainsi
certains jours paraît
Une
flamme à nos yeux
À
l'église où j'allais
On
l'appelait le Bon Dieu
L'amoureux
l'appelle l'amour
Le
mendiant la charité
Le
soleil l'appelle le jour
Et le
brave homme la bonté.
Sur la
place où tout est tranquille
Une
fille s'est mise à chanter
Et
son chant plane sur la ville
Hymne
d'amour et de bonté
Mais
sur la ville il fait trop chaud
Et
pour ne point entendre son chant
Les hommes
ferment leurs carreaux
Comme
une porte entre morts et vivants
Ainsi
certains jours paraît
Une
flamme en nos cœurs
Mais nous
ne voulons jamais
Laisser
luire sa lueur
Nous
nous bouchons les oreilles
Et
nous nous voilons les yeux
Nous
n'aimons point les réveils
De
notre cœur déjà vieux
Sur
la place un chien hurle encore
Car
la fille s'en est allée
Et
comme le chien hurlant la mort
Pleurent
les hommes leur destinée
Arrangement,
guitare
et claves : Bernard
Haillant
Violoncelle :
Mathias Castagné
Saxophone
soprano :
Claude Georgel

13. Tjibaou Yéweiné Yéweiné 
Paroles et
musique de
Bernard Haillant
en
gestation de 1989
à 2000…
refrain
perpétuel
Tjibaou,
Yéweiné, Yéweiné,
prenons le
chemin de frères
prenons le
chemin !
pleurez Maré
pleurez Lifou1
et d’Ouvéa1
pleurez
beaucoup
pleurez
Wallis
et Futuna
Vanuatu
Mururoa
pleurez
geishas
et popinés
pleurez les
squaws
les vahinés
pleurez poé
pleurez
bounia
pleurez potée
pleurez pizza
pleurez
cocotiers
flamboyants
arbres de fer
… fougères
pleurez
ignames
et niaoulis
pins
colonnaires
urus, banians
pleurez
Gauchet
pleurez
Thomas8
pleurez Sally8
et Cugola8
pleurez Léone8
et Johanna8
Tamaï, Dick8
Akim et
François8
pleurez de
Hienghen
à Bourail
Bouloupari
Santo, Paris
de Papeete
à Nouméa
de Tiendanite
à Gossanah
FLNKS
Palika
députés,
maires
RPCR
pleurez Ataï
et Machoro
Declercq,
Tual
et Nonnaro
bien sûr
pleurez
Pons et
Pilate
pleur’
Djubelly
maudis ton
acte
pleurez
Touvier
Slobo, Sharon
Napoléon
Papon, Peron
pleurez
Franco
Mussolini
Hitler,
Staline
Barbie, Mao
pleurez Grand
Soir
et Jubilé
Temple
Solaire
Septembre
Noir
pleurez
Tutsis
pleurez Hutus
pleurez
Pygmées
pleurez
Bantous
pleurez
Mobutu
Kabila
Netanyahou
Amin, Saddam
pleurez CIA
KGB
Nuit de
Cristal
enfants
violés
pleure
Hiroshima
mon amour
et d’Oradour
pleurez
toujours
pleurez
despotes
et négriers
pleurez Pol
Pot
et Menguelé
pleurez Sabra
et Chatila
intifada
Grozny, Gaza
de Tien An
Men
jusqu’à
Charonne
des foll’s de
mai
jusqu’aux
pogroms
depuis la Saint-
Barthélemy
d'Inquisition
en Algérie
de Tchernobyl
à Seveso
de Bhopal au
Pinatubo
pleurez sida
pleurez
cancer
et d’Alzheimer
pleurez amer
pleurez
Hikmet
et Neruda
Victor Jara
Garcia Lorca
pleurez
Gandhi
pleurez
Rabbin
pleurez
Sadate
et Luther
King
pleurez Jésus
pleurez
Bouddha
pleurez Bao
pleurez Allah
Vincent de
Paul
Mèr’ Teresa
Théodor’
Monod
Mandela
pleurez
Louise
Michel Rocard
pleurez
Pidjot
Maurice
Leenhardt
et vous
Marie-Claude pleurez
vous
et toute
votre famille…
pèr’s et
mères
frèr’s et
sœurs ;
pleurez
enfants,
oncles, cousins,
pleurez !
et vous, oui
oui, vous-nous-tous
depuis la
nuit des temps
de tous les
continents,
humains de
tout âge
tous sexes
tout’s
couleurs
langues,
traditions
religions
et nous, oui
nous
je-tu-il-nous-vous-Elles
nous-vous-tous
tour à tour
téméraires et
timides
capables
d’es- et désespérance,
secours,
dédain
meurtres
parjure,
violence
joies,
tendresse, perversité
guerre et
paix
maladie,
misère
folie,
volupté
cruauté sans
frontière
capables
tour à tour
d’injustice,
d’amour
de merveilles
et d’horreurs
nous-vous-elle
toi et moi
- Kanaky -
ramassons le
pire
et
l’meilleur :
[Dutroux –
François d’Assise]
tout en vrac
dans un sac,
sac sur
l’épaule
et
comm’ le veut
la coutume :
prenons le
chemin de frères
prenons le
chemin…
prenons le
chemin
de frères
prenons le
chemin…
prenons le chemin
de frères
prenons le
chemin…
Arrangement :
Bernard Haillant
avec
la participation de Jacques Haurogné,
co-soliste,
2ème
voix et griot en transe du final…
Foule
et youyous du final : « CATIMINI »
(Cokie Demaïa, Stéphanie Liesenfeld, Jean-François
Maenner, Isabelle Morelli et Janneke
Muller)
ainsi que Hervé Delaiti, Véronique Gain et Laurent Malot
Ces trois îles forment,
avec TIGA, les îles Loyauté, à l’est, au large de la Grande Terre
« popiné » : équivalent de « vahiné » pour la Nelle-Calédonie
(normalement
sans accent)
« poé » :
perle, en tahitien : il me semblait que cela désignait une sorte
de
confiture…
Un « bounia »
n’est pas un Auvergnat « bois et charbon », mais un plat
typiquement
kanak
« niaouli » : arbre de Nelle-Calédonie dont
les
feuilles donnent le goménol
« uru » :
fruit de l’arbre à pain
« banian » : arbre majestueux aux racines aériennes –
écorce
textile
Quelques amis, parmi tant
d’autres, de Tahiti, Vanuatu, Nelle -Calédonie ; qu’il
en
manque !
Djubelly Wéa, assassin de
Jean-Marie Tjibaou et Yéweiné Yéweiné, le 4 mai 1989
« Bao » :
dieu Kanak
Épouse de Jean-Marie
Tjibaou